La guerre du siècle entre le Liban et Israël

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Nabih al-Bourgi
reseauinternational.net
dim., 23 juin 2024 18:08 UTC

Notre problème avec les Israéliens est qu’ils considèrent leur puissance militaire comme une occurrence divine et que leur Dieu est le Seigneur de leur armée, au point qu’ils ont vu dans les avions Mirage, qui ont détruit l’armée de l’air égyptienne dès la première heure de la Guerre de juin 1967, les oiseaux d’airain que Jéhovah a envoyés pour coffrer nos (mauvais) esprits. Quant à notre force militaire, elle serait en deçà de la condition humaine, tandis que notre Dieu serait le Seigneur des victimes ou, si vous le préférez, le Seigneur des macchabées.

La situation technologique d’Israël est absolument incomparable à la nôtre qui reste objectivement une sous technologie, tandis que les juifs qui ont débarqué en Palestine (encore sous domination ottomane) ont pensé dès 1912 à fonder le «Technion» ou l’Institut de technologie d’Israël, lequel a commencé ses travaux en 1924, c’est-à-dire environ un quart de siècle avant que David Ben Gourion n’annonce la création de l’État hébreu.

Et lorsque le président Ronald Reagan envisagea de lancer le programme de la «Guerre des étoiles» afin de développer un réseau de satellites dont le rôle aurait été la détection et la destruction de missiles intercontinentaux ennemis en 7 à 8 secondes, il dépêcha en août 1981 le général James Abrahamson, le directeur exécutif du projet, à Tel-Aviv, pour la signature d’accords liés à la fabrication de certains éléments sophistiqués du système.

D’un point de vue militaire, c’est ce qui a rendu Israël dramatiquement supérieur sur tous les pays arabes, jusqu’à ce que cette supériorité soit brisée par l’apparition des missiles (entre leurs mains). Et c’est sans doute ce qu’a pressenti Hillary Clinton, secrétaire d’État à l’époque de Barack Obama, lorsqu’elle a appelé les Israéliens à prendre en compte un changement en cours qui devrait les mener à revoir nombre de leurs concepts du pouvoir et de l’équilibre. À l’époque, elle avait été attaquée de toutes parts par les loups qui l’avaient accusée de contenter les Arabes et de poignarder les Israéliens dans le dos, allant jusqu’à travailler à son échec lors de la compétition présidentielle face à Donald Trump.

La supériorité militaire n’est pas chose éternelle dans une région en proie à des secousses et à des ruminations permanentes. Les combattants du Viêtcong ont fini par abattre quotidiennement des bombardiers géants par des missiles SAM-7, portant à près de 10 000 le nombre d’avions et d’hélicoptères américains abattus.

Et, pendant la phase de libération, ce fut extraordinairement fantastique de voir les résistants libanais escalader le mur menant à la forteresse de Beaufort (le château du Haut Rocher ou Qala’at ash-Shqif en arabe), éviter les dispositifs de surveillance électronique, les mines et autres obstacles d’une grande complexité, afin de planter l’étendard de la Résistance tout en haut du château.

Des scènes grandioses apparurent également à Gaza. Qui aurait imaginé que des combattants, aussi coriaces soient-ils, pouvaient affronter l’horreur aérienne, terrestre et maritime qui s’est abattue avec une telle monstruosité sur la bande de Gaza ; une bande de terre dépourvue de reliefs naturels que les bombes américaines ont transformé en décombres ? Qui aurait imaginé que depuis plus de huit mois ces combattants de la Résistance épuisent les rois de la Torah vers lesquels se sont tournés des rabbins, des politiciens et des généraux ?

Les experts en stratégie ont décrit cette guerre sur Gaza comme « la première véritable guerre entre les Arabes et les Israéliens ». Une expérience amère qui a amplifié les angoisses des dirigeants militaires israéliens, lesquels disposent de dizaines de rapports sur l’arsenal de missiles du Hezbollah libanais, sans oublier sa flotte de drones multi-missions, alors qu’il se dit qu’il dispose de missiles encore plus puissants non encore sortis de leurs silos.

Et dernièrement, nous avons tous observé la stupeur des dirigeants israéliens devant l’incapacité de son institution militaire à débusquer le « drone Hodhod », en dépit de ses capacités technologiques écrasantes. Un drone qui nous a donné à voir des sites stratégiques identifiés comme des cibles possibles en Israël. Des cibles qui pourraient être transformées en décombres en quelques minutes.

Si Benjamin Netanyahou, à sa manière acrobatique, tente d’utiliser la carte libanaise dans son conflit avec Joe Biden, toute guerre entre le Liban et Israël sera la « Guerre du siècle », car ses répercussions ne se limiteront pas à changer les orientations stratégiques de la région, mais s’étendront même à la modification de ses cartes.

C’est ce qui provoque la panique des Américains qui estiment que leur intervention militaire sera désastreuse, et que leur non-intervention sera tout aussi désastreuse. L’armada diplomatique œuvre donc de toutes ses forces pour une solution durable à la situation frontalière entre le Liban et Israël.

La mission n’est pas impossible si le rictus de colère des États-Unis est cette fois-ci tourné vers Israël, non vers le Liban…

Source : Addiyar (Liban) حرب القرن بين لبنان و إسرائيلhttps://addiyar.com/article/2180821-%D8%AD%D8

Traduction de l’arabe par Mouna Ano-Nakhal


Commentaires du traducteur Mouna Ano-Nakhal :

Le mardi 18 juin, l’armée israélienne faisait savoir que «des plans opérationnels pour une offensive au Liban ont été approuvés et validés», tandis que le ministre israélien des Affaires étrangères, Israël Katz, déclarait de son côté : « dans une guerre totale, le Hezbollah sera détruit et le Liban sera sévèrement touché », rejoignant en cela ses collègues ayant menacé le Liban de le ramener à l’âge de pierre, comme ils tentent de le faire à Gaza avant d’en achever le nettoyage ethnique et de la reconstruire pour leur profit et celui d’investisseurs alliés.

En réponse Sayed Hassan Nasrallah, le secrétaire général du Hezbollah, a prononcé le 19 juin un discours adressant un message aux États-Unis, aux Israéliens, aux Européens et aux Chypriotes qui seraient impliqués dans le soutien militaire d’Israël depuis qu’ils ont rejoint l’Union européenne en 20041.

Un message consistant à faire savoir que toute attaque contre le Liban sera combattue par voie terrestre, maritime et aérienne sans restrictions, sans règles et sans limites ; réitérant la détermination de la Résistance libanaise à continuer de soutenir Gaza ; et affirmant que la solution est simple pour l’ensemble de tous les fronts de la Résistance ; « arrêtez la guerre contre nos proches à Gaza ; faute de quoi, ne cherchez pas d’autres solutions ».

Et cela, non sans rappeler la vidéo publiée la veille par les médias militaires du Hezbollah, intitulée «Voici ce qu’a ramené le Hodhod» en planant furtivement au-dessus de la ville et du port de Haïfa2. Le Hodhod ou le drone du même nom signifiant « la Huppe » en français. Un oiseau vu dans la tradition arabe comme un animal spirituel symbolisant la sagesse et l’aptitude à communiquer entre les différentes dimensions de l’existence.

Puis une deuxième vidéo traduite en anglais et en hébreu, intitulée « À qui de droit », a été publiée dans la soirée de ce 22 juin3. Elle débute avec une phrase de Sayed Nasrallah extraite de la première vidéo : « Si la guerre est imposée au Liban, la Résistance combattra sans restrictions, sans règles et sans limites ». Elle se termine par une autre de ses phrases : « Celui qui pense à la guerre contre nous, le regrettera ». Elle indique les coordonnées des cibles possibles sans les nommer. Diverses sources ont expliqué qu’il s’agit d’un message que seuls les décideurs et les cercles concernés en Israël peuvent comprendre.

Existe-t-il une solution durable qui puisse empêcher l’escalade vers une guerre entre le Liban et Israël ? Laquelle guerre s’étendrait à tous les autres fronts de la Résistance soutenant la population de Gaza, où le bilan des victimes de ce samedi 22 juin4 compte 38 martyrs, 14 personnes disparues sous les décombres des bâtiments bombardés par l’armée israélienne, et 50 personnes blessées dont certaines dans un état grave.

Notes:

  1. Vidéo en arabe : Hassan Nasrallah: Nous avons obtenu de nouvelles armes et si la guerre est imposée au Liban, nous combattrons sans limites ni restrictions (19 juin 2024)
  2. Vidéo de 9’30 : Les médias militaires du Hezbollah publient une vidéo intitulée : «Voici ce que la huppe a rapporté». (18 juin 2024).
  3. Vidéo des médias militaires du Hezbollah intitulée «À qui de droit» (22 juin 2024) https://t.me/wattannews/74542
  4. عشرات الشهداء في مجازر إسرائيلية في مدينة غزة.. الاحتلال نسف مبانيَ سكنية في 4 أحياء

Source de cet article : Sott.net



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